Associé à la neuvième symphonie de Beethoven, un poème de Friedrich Schiller (1759–1805i), l’« Ode à la joie », est devenu l’hymne européen après avoir été chanté dans des salles de concert et des camps de concentration, en Allemagne et bien au-delà des frontières. Symbole de réconciliation, il témoigne à la fois d’une culture classique commune et de l’aspiration à un avenir de fraternité. Le poème, rédigé en 1785, est marqué par le piétisme des proches de l’auteur, mais aussi par un esprit d’ouverture.
O Freunde, nicht diese Töne! |
Ô amis, pas de ces accents ! |
Sondern laßt uns angenehmere anstimmen |
Laissez-nous en entonner de plus agréables, |
und freudenvollere. |
Et de plus joyeux ! |
Freude, schöner Götterfunken |
Joie, belle étincelle des Dieux, |
Tochter aus Elysium, |
Fille de l’Élysée |
Wir betreten feuertrunken, |
Ivres de feu, nous pénétrons |
Himmlische, dein Heiligtum! |
Dans ton sanctuaire, ô divinité ! |
Deine Zauber binden wieder |
Ta magie unit à nouveau |
Was die Mode streng geteilt; |
Ce que la coutume a sévèrement divisé. |
Alle Menschen werden Brüder |
Tous les hommes seront frères |
Wo dein sanfter Flügel weilt. |
Là où ta douce aile se déploie. |
Wem der große Wurf gelungen, |
Celui qui a eu la grande chance |
Eines Freundes Freund zu sein; |
D’être l’ami d’un ami, |
Wer ein holdes Weib errungen, |
Celui qui a trouvé une épouse jolie, |
Mische seinen Jubel ein! |
Qu’il mêle sa jubilation à la nôtre. |
Ja, wer auch nur eine Seele |
Oui, de même celui qui n’appelle sienne |
Sein nennt auf dem Erdenrund! |
Qu’une seule âme sur toute la terre, |
Und wer’s nie gekonnt, der stehle |
Et que celui qui jamais ne l’a su se dérobe |
Weinend sich aus diesem Bund! |
En pleurs à cette union ! |
Freude trinken alle Wesen |
Toutes les créatures boivent la joie |
An den Brüsten der Natur; |
Au sein de la Nature ; |
Alle Guten, alle Bösen |
Tous les bons, tous les méchants, |
Folgen ihrer Rosenspur. |
Suivent son chemin de roses. |
Küsse gab sie uns und Reben, |
Elle nous a donné des baisers et la vigne, |
Einen Freund, geprüft im Tod; |
Un ami, jusqu’à la mort. |
Wollust ward dem Wurm gegeben, |
Même le ver a reçu la volupté |
und der Cherub steht vor Gott. |
Et le chérubin se tient devant Dieu. |
Froh, wie seine Sonnen fliegen |
Joyeux, comme ses soleils qui volent |
Durch des Himmels prächt’gen Plan, |
Sur les routes splendides des Cieux, |
Laufet, Brüder, eure Bahn, |
Poursuivez, frères, votre course, |
Freudig, wie ein Held zum Siegen. |
Euphoriques, comme le héros qui vole à la victoire. |
Seid umschlungen, Millionen! |
Soyez embrassés, millions! |
Diesen Kuß der ganzen Welt! |
Ce baiser du monde entier ! |
Brüder, über’m Sternenzelt |
Frères, au-dessus de la voûte étoilée |
Muß ein lieber Vater wohnen |
Un père chéri doit habiter. |
Ihr stürzt nieder, Millionen? |
Millions, vous vous agenouillez ? |
Ahnest du den Schöpfer, Welt? |
Monde, pressens-tu ton créateur ? |
Such‘ ihn über‘m Sternenzelt! |
Cherche-le au-dessus du firmament ! |
Über Sternen muß er wohnen. |
Il doit demeurer au-delà des étoiles. |
Friedrich Schiller, « Ode à la joie », 1785
Pour lire le texte original en ligne (édition de 1808) : https://de.wikisource.org/wiki/Ode_an_die_Freude